1. Le point de départ : la température interne “normale”
Chez l’adulte en bonne santé, la température corporelle interne (mesurée au rectum ou très en profondeur) tourne autour de :
≈ 36,5 à 37,5 °C comme zone “normale”
Il y a des variations naturelles selon :
le moment de la journée (plus basse le matin, plus haute en fin d’après-midi),
l’activité physique,
l’âge, le sexe,
le mode de mesure (oreille, bouche, rectum…).
Dès qu’on s’éloigne trop de cette zone, le corps commence à dysfonctionner.
2. Jusqu’où peut-on supporter la chaleur ?
2.1 Hyperthermie : quand le corps n’arrive plus à se refroidir
On parle d’hyperthermie quand la température du corps monte parce qu’il accumule trop de chaleur (ce n’est pas une fièvre liée à une infection, mais un “coup de chaud”).
En gros :
≈ 38 °C : déjà trop chaud si ce n’est pas une fièvre “normale”
≈ 40 °C : zone de coup de chaleur / urgence médicale possible (maux de tête, confusion, malaise)
≈ 41–42 °C : risques graves sur le cerveau, le cœur, les reins
≥ 43–44 °C : température généralement incompatible avec la vie (sauf cas exceptionnels)
Des cas rares de survie jusqu’à ~46,5 °C ont été décrits, mais ce sont des exceptions extrêmes.
Donc, côté chaleur :
À partir de 40 °C de température interne, on est déjà dans une zone d’urgence vitale.
2.2 Ce qui tue en réalité : chaleur + humidité (la “wet-bulb”)
Ce n’est pas seulement la température de l’air qui compte, mais la capacité du corps à évacuer la chaleur grâce à la transpiration.
Si l’air est très humide, la sueur s’évapore mal → le corps ne se refroidit plus.
C’est là qu’intervient la notion de température au thermomètre mouillé (wet-bulb temperature), qui combine chaleur et humidité.
Les études indiquent qu’une wet-bulb d’environ 35 °C est proche de la limite théorique de survie humaine : au-delà, même une personne jeune et en bonne santé ne peut plus refroidir son corps, et la température interne grimpe jusqu’au coup de chaleur fatal en quelques heures.
Des travaux récents suggèrent même que certaines personnes peuvent décompenser plus tôt, autour de wet-bulb 31–33 °C, en particulier les plus vulnérables.
Concrètement, cela correspond par exemple à :
Environ 31–33 °C avec humidité très élevée (75–90 %)
Ou 40 °C et plus avec une humidité significative : le corps est vite submergé.
2.3 Température de l’air : quand ça devient dangereux ?
Les organismes météo utilisent souvent l’indice de chaleur (heat index), qui combine température et humidité :
≈ 32–40 °C de heat index : fatigue, crampes, risque de coup de chaleur pour certaines personnes
≈ 41–54 °C de heat index : catégorie “danger” → risque élevé de coup de chaleur, surtout en activité prolongée
Ce qui veut dire :
On peut mourir de la chaleur bien avant d’atteindre des valeurs extrêmes type 50 °C.
À 35–40 °C avec une forte humidité, le risque est déjà très sérieux, surtout sans ombre, sans eau, sans ventilation.
3. Jusqu’où peut-on supporter le froid ?
3.1 Hypothermie : le corps se refroidit trop
On parle d’hypothermie quand la température interne descend en dessous de 35 °C.
On distingue généralement :
Hypothermie légère : 35 à 32 °C
Frissons intenses, maladresse, troubles de la parole, confusion.
Hypothermie modérée : 32 à 28 °C
Frissons qui cessent (mauvais signe), grande confusion, somnolence, troubles du rythme cardiaque.
Hypothermie sévère : < 28 °C
Inconscience, rythme cardiaque très ralenti, risque majeur d’arrêt cardiaque.
En dessous d’environ 24–25 °C de température interne, la survie est très improbable en conditions normales, même si des cas rarissimes de réanimation ont été rapportés à des températures encore plus basses (par exemple après chute en eau glacée avec refroidissement très rapide et prise en charge extrêmement spécialisée).
3.2 Température de l’air : le rôle énorme du vent et de l’humidité
Le froid ressenti et le risque vital ne dépendent pas uniquement du thermomètre, mais aussi :
du vent (wind chill),
de l’humidité (pluie, vêtements mouillés),
de la durée d’exposition,
de si le corps est protégé (vêtements, abri).
Les services météo montrent que :
À une température de −5 °C avec vent fort, la température ressentie peut être de −20 à −30 °C, et la perte de chaleur du corps équivaut à un air immobile à ces valeurs.
Avec un refroidissement éolien d’environ −28 à −35 °C, un visage exposé peut subir un début de gelure en 10 à 30 minutes.
Et il ne faut pas oublier :
On peut entrer en hypothermie au-dessus de 0 °C, si l’on est mouillé, immobile, fatigué et dans le vent (pluie froide, mer, montagne, etc.).
4. Ce qui fait varier ces limites d’une personne à l’autre
Les chiffres ci-dessus sont des ordres de grandeur généraux, mais la réalité est très individuelle. La tolérance au chaud ou au froid dépend notamment de :
L’âge :
Bébés, jeunes enfants et personnes âgées régulent moins bien leur température.
L’état de santé :
Problèmes cardiaques, respiratoires, rénaux, troubles neurologiques, maladie métabolique (diabète…), etc.
Certains traitements médicamenteux perturbent la sudation ou la circulation.
L’acclimatation :
Une personne habituée à un climat chaud supporte mieux 35 °C qu’une personne venant d’un climat frais.
Idem pour le froid chez les gens vivant en montagne ou en pays nordiques.
La condition physique et l’activité :
Un corps entraîné et en mouvement produit plus de chaleur (utile par temps froid, mais dangereux par temps très chaud).
L’habillement et l’abri :
Couches de vêtements, imperméabilité, isolation, présence d’ombre ou de soleil direct, chauffage, climatisation…
Hydratation, alimentation, alcool :
La déshydratation et l’alcool aggravent nettement le risque de coup de chaleur ou d’hypothermie.
5. Ce qu’il faut surtout retenir en pratique
On pourrait résumer ainsi :
Côté chaleur
Le corps fonctionne bien autour de 36,5–37,5 °C.
À partir de ≈ 38 °C (sans infection), on parle d’hyperthermie.
À ≈ 40 °C de température interne, c’est potentiellement mortel sans prise en charge rapide.
Au-delà de ≈ 42–43 °C, les dégâts irréversibles sont très probables.
Des conditions de chaleur + humidité pouvant donner une wet-bulb proche de 30–35 °C doivent être considérées comme extrêmement dangereuses, même pour les personnes en bonne santé.
À faire en cas de forte chaleur :
Boire régulièrement (eau),
éviter les efforts aux heures les plus chaudes,
rechercher l’ombre, la ventilation ou la climatisation,
porter des vêtements légers et de couleur claire,
surveiller les signes d’alerte : maux de tête, confusion, vertiges, nausées, absence de sueur, peau chaude et sèche → urgence médicale.
Côté froid
L’hypothermie commence dès que la température interne passe sous 35 °C.
Entre 32 et 28 °C, le risque vital augmente fortement.
En dessous de ≈ 28 °C, on est en hypothermie sévère avec risque majeur d’arrêt cardiaque.
Des wind chills de −30 °C et au-delà peuvent provoquer des gelures en quelques dizaines de minutes sur peau exposée.
À faire en cas de froid intense :
Superposer les couches de vêtements,
garder la tête, les mains et les pieds bien couverts,
rester au sec (l’humidité est l’ennemie absolue),
limiter le temps d’exposition,
manger et boire suffisamment (éviter l’alcool),
surveiller les signes d’alerte : frissons qui cessent, confusion, difficultés à parler, somnolence, perte de coordination → urgence médicale.
6. Conclusion
La question “Jusqu’à quelle température un être humain peut-il supporter la chaleur ou le froid ?” n’a pas une seule réponse simple, mais on peut dire :
Le corps humain ne supporte que de très petits écarts autour de sa température interne normale.
Vers 40 °C internes (ou moins chez les personnes fragiles), la chaleur devient déjà potentiellement mortelle.
Vers 28 °C internes et en dessous, le froid devient critiquement dangereux.
Des conditions extrêmes de chaleur humide ou de froid avec vent peuvent tuer en quelques dizaines de minutes à quelques heures, sans que la température de l’air paraisse “extrême” au premier regard.
Et très important :
Ces seuils ne sont pas des objectifs à tester, mais des zones de danger à éviter le plus possible.
En cas de doute ou de symptômes (coup de chaleur, hypothermie), c’est urgence médicale, pas d’autosurvie “héroïque”.